Du sens, de la mémoire, s.v.p.! / Make sense, remember, please!


Nonsense, amnesia and other conventional wisdom are the targets here:
A critical look at media-political discourse in Canadian federal politics, notably but not only regarding the Quebec-Canada relationship. Also of interest: the relationship between Indigenous Peoples and Canada, and Canada's place in the world. In early days, this blog will be tiny. We'll see if it may grow.

La sottise, l'amnésie et autre sens commun sont mes cibles: un regard critique sur le discours politico-médiatique en politique fédérale canadienne, notamment en ce qui concerne la relation Québec-Canada. Aussi: la relation entre les peuples autochtones et le Canada, et la place du Canada dans le monde. Ce blog commence tout petit. On verra s'il peut bien grandir.

vendredi 11 novembre 2011

Les femmes autochtones et l'indifférence

Les femmes autochtones sont assassinées, violées, kidnappées et généralement violentées à un rythme effarant au Canada. Au moins 582 ont disparu ou ont été assassinées depuis 30 ans, selon l’Association des femmes autochtones du Canada.  Amnesty International a publié un rapport très documenté et critique en 2009. On s’indigne de temps en temps dans les média et la classe politique, et puis on passe à autre chose.
Il y avait un bon dossier d’Isabelle Hachey dans La Presse à ce sujet cette semaine (http://www.cyberpresse.ca/actualites/201111/07/01-4465568-des-centaines-de-femmes-autochtones-tuees-dans-lombre.php?utm_categorieinterne=trafficdrivers&utm_contenuinterne=cyberpresse_B4_manchettes_231_accueil_POS4) (c’est de là que vient le chiffre ci-dessus). Le problème, c’est que Hachey n’avait rien de nouveau à nous apprendre. Elle nous a mis à jour sur la disparition en 2008 de deux jeunes filles de Kitigan Zibi, dans la Haute Gatineau, et sur la frustration de leurs proches. Elle nous a rappelés des cas classiques, au Manitoba et en Colombie Britannique. Elle a souligné le contraste surréaliste entre le cirque médiatique à l'occasion de la fuite de Kitigan Zibi d’un jeune lion, aussi en 2008 (que lui a rappelé le Chef Gilbert Whiteduck), d’une part, et l’indifférence dans laquelle baignent généralement les disparitions de femmes autochtones, d'autre part.
On imagine qu’Isabelle Hachey a travaillé fort pour convaincre ses patrons de la laisser travailler sur le dossier, et ensuite de le publier en bonne place; elle mérite sans doute des félicitations pour ces efforts. Et paradoxalement, ses textes dans La Presse portent presque autant sur le silence et l’indifférence des média que sur les femmes autochtones elles-mêmes.  Elle répète que ces femmes sont « assassinées depuis 30 ans… (d)ans l’indifférence des médias, de la police et de la population en général »; que « la réponse était toujours non, non et non » quand les familles demandaient aux média de parler de leurs filles et sœurs disparues; que « les médias ont largement ignoré la nouvelle » de l’assassinat de Tiffany Morrison, de Kaahnawake; que « presque personne n’est venu » à une conférence de presse à Kitigan Zibi.
Rien de nouveau, donc, dans La Presse. On n’apprend rien, strictement parlant. Alors pourquoi le dossier? Isabelle Hachey a l’air de trouver ça important, et peut-être quelqu’un d’autre aussi dans la salle de rédaction du journal. On peut voir le dossier comme un effort pour y mettre fin, à l’indifférence générale. On peut penser que cet effort ne peut sûrement pas faire de mal. Mais en fait, et encore paradoxalement, le dossier peut faire du mal – et il en fera s’il n’a pas de suites dans La Presse et si d’autres médias n’en prennent pas non plus acte. S’il est le début d’une campagne de presse pour faire la lumière sur ce scandale, il aura fait du bien. S’il n’est suivi par rien d’autre que le retour du silence et de l’indifférence médiatique, il n’aura servi qu’à donner un alibi à La Presse et à faire vendre des copies le 8 novembre. L'indifférence se nourrit de moments comme celui-ci: elle se donne bonne conscience en se scandalisant de l'horreur, et elle retourne à ses affaires.

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